Qui est Adnan Abou Walid al-Sahraoui, l’impitoyable chef djihadiste au Sahel tué par les forces françaises ?

Qui est Adnan Abou Walid al-Sahraoui, l’impitoyable chef djihadiste au Sahel tué par les forces françaises ?

Cet homme d’une quarantaine d’années, à la barbe et au turban noirs selon les rares photos connues de lui, était décrit comme « maître absolu » du groupe Etat islamique au Grand Sahara. Il cultivait la réputation de fervent partisan de la charia, indifférent à la mort de civils.

Les forces françaises ont annoncé avoir tué le chef du groupe djihadiste Etat islamique au Grand Sahara, Adnan Abou Walid Al-Sahraoui. AFP

Depuis plus d’un an et demi, il était la cible « prioritaire » de la France et de ses alliés au Sahel. Adnan Abou Walid al-Sahraoui, dont Paris a annoncé la mort, était considéré comme le plus intraitable chef djihadiste de la zone.

Des informations sur la mort du chef du groupe « État islamique dans le Grand Sahara » (EIGS), entre Ménaka, dans le nord-est du Mali, et l’autre côté de la frontière avec le Niger, son principal champ d’action, circulaient depuis le mois d’août.

C’est dans la nuit de mercredi à jeudi que Paris a confirmé qu’il avait été « neutralisé par les forces françaises », lors d’une opération menée à la mi-août, selon la ministre des Armées Florence Parly.

Cet homme d’une quarantaine d’années, à la barbe et au turban noirs selon les rares photos connues de lui, était né au Sahara occidental et fut membre du Front Polisario qui réclame l’indépendance de cette région.

Après avoir passé une partie de sa jeunesse en Algérie, où il aurait rejoint des groupes islamistes armés, selon plusieurs experts, il participe à la création en 2011 dans le nord du Mali du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).

Partisan inflexible des châtiments corporels

Le Mujao se fait notamment connaître avec l’enlèvement en octobre 2011 de deux coopérants espagnols et d’une Italienne dans un camp de réfugiés sahraouis près de Tindouf, dans le sud-ouest de l’Algérie. À l’époque, Adnan Abou Walid al-Sahraoui lui-même revendique le versement d’une « rançon considérable » de 15 millions d’euros au Mujao, pour leur libération en juillet 2012.

Le Mujao fait partie de la coalition djihadiste liée à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui prend en mars-avril 2012 le contrôle du nord du Mali. Il en est alors le porte-parole, basé à Gao, principale ville de la région, où il a laissé le souvenir d’un partisan inflexible de l’application de la charia, en particulier des châtiments corporels.

« Si à Gao plus qu’ailleurs on a coupé les mains des personnes accusées de vol, c’est à cause des instructions d’Abou Walid », affirme un élu de la ville, qui a requis l’anonymat.

Après le lancement en 2013 de l’opération française Serval qui chasse les djihadistes des villes et localités du nord du Mali, le Mujao défait fusionne avec le groupe de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, pour créer le groupe Al-Mourabitoune.

Mais en 2015, Adnan Abou Walid al-Sahraoui, réputé acquis à une vision plus transnationale et mondialisée du djihad que la plupart de ses homologues sahéliens, fait dissidence du groupe de Belmokhtar, toujours affilié à Al-Qaïda, pour prêter allégeance au groupe État islamique (EI).

Indifférent aux morts de civils

En 2017, alors que les groupes se réclamant d’Aqmi fusionnent au sein du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim, selon l’acronyme arabe) dirigé par le chef touareg malien Iyad Ag Ghaly, il frappe un grand coup en octobre avec l’embuscade de Tongo Tongo au Niger, dans laquelle périssent quatre soldats américains et quatre militaires nigériens.

Le groupe monte en puissance dans cette zone dite des « trois frontières », aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso. De nombreuses attaques meurtrières contre les communautés touareg sont imputées à l’EIGS, qui recrute largement parmi les Peuls et est accusé de s’impliquer délibérément dans les tensions interethniques.

Les spécialistes et les sources de sécurité prêtent à la fois à Adnan Abou Walid al-Sahraoui un exercice très personnalisé du commandement et une apparente indifférence aux morts de civils.

Une source de sécurité malienne le décrit ainsi comme le « maître absolu » de l’EIGS qui « n’hésitait pas à mener lui-même les attaques contre les troupes étrangères et nigériennes à la frontière avec le Mali ».

Ennemi prioritaire

Entre fin 2019 et janvier 2020, une série d’attaques attribuées pour l’essentiel à son groupe contre des camps militaires nigériens, maliens et burkinabè dans la zone des « trois frontières », font des centaines de morts.

Malgré les pertes qu’il subit, le groupe persiste dans sa volonté d’imposer une vision intransigeante de la charia, accusant parfois ses rivaux de tiédeur dans son application. Ainsi en mai, lors du marché hebdomadaire de Tin Hama, près d’Ansongo (nord), des membres de l’EIGS ont publiquement amputé d’une main et d’un pied trois « coupeurs de route » présumés.

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